Télé, web et CSA sont dans un bateau

Posted by on mars 10, 2014 in Focus | Commentaires fermés sur Télé, web et CSA sont dans un bateau

Attention, article hautement subjectif. Je vous laisse débattre ou m’insulter dans les commentaires. On nous dit souvent « faites de la qualité et vous aurez des liens », voyons pourquoi en France ce raccourci est loin d’être évident…

Difficile de trouver un titre accrocheur résumant le billet que je souhaite écrire aujourd’hui. J’ai pensé à l’intituler « Le boulet CSA », « L’hypocrisie des chaines d’infos » ou encore « Comment gagner un point de croissance en supprimant une loi stupide ».

Bref, aujourd’hui on va parler de la loi sur la publicité clandestine. Pour rappel (et pour duplicate avec legifrance) :

La publicité clandestine est interdite.

Pour l’application du présent décret, constitue une publicité clandestine la présentation verbale ou visuelle de marchandises, de services, du nom, de la marque ou des activités d’un producteur de marchandises ou d’un prestataire de services dans des programmes, lorsque cette présentation est faite dans un but publicitaire.

Parlons donc de cette mise en application et pourquoi cette loi est en fait une gigantesque mascarade face aux nouvelles sources d’informations…

C’est quoi le rapport ?

Que fait un billet de ce genre sur ce blog ? C’est simple, il s’agit d’une vision subjective globale sur la place de la censure sur un monde où Internet est peu à peu en train de remplacer les autres médias et où l’accès à l’information est si simple que l’ère pré-haut-debit mériterait d’être soigneusement revue. Par extension, il s’agit aussi d’une solution simple qui permettrai d’amener de la visibilité à des marques (web) et d’enrichir la qualité de contenu que les médias traditionnels délivrent.
La télévision reste le média préféré des français avec environ 4 heures journalières de visionnage. Il est donc intéressant de se pencher sur les (non-) interactions  que cette dernière peut avoir avec le web.

Il était une fois…la censure

Le conseil supérieur de l’audiovisuel, autorité administrative indépendante, est une belle particularité française, du moins dans son format actuel.

Créée pour des actions nobles, il opère de près ou de loin tout ce qui touche à lédition et diffusion de programmes audiovisuels. Ainsi, on connait parfaitement les pictogrammes de limite d’age, son travail sur les fréquences du réseau TNT ou encore le respect de quota de chansons françaises à la radio et à la télévision.

Cet organisme a aussi un rôle de sanction sur de nombreux points. Bien que chacun des points mériterait qu’on s’y attarde, je ne m’évaderai pas sur ce qui ne concerne pas la publicité clandestine.

Pour voir quelques exemples de sanction de publicité clandestine, vous pouvez voir une liste de décisions ici.

Voici ce que recherche, entre autre, le CSA pour voir s’il s’agit de publicité clandestine ou non :

  • l’absence de pluralité dans la présentation des biens, services ou marques ;
  • la complaisance affichée envers tel ou tel produit ;
  • la fréquence de la citation et/ou de la visualisation du produit ou de la marque ;
  • l’indication de l’adresse ou des coordonnées téléphoniques ou internet d’un annonceur ;
  • l’absence de tout regard critique.

Source

Ainsi, il n’est pas rare d’entendre très souvent des animateurs, après avoir fourché sur la prononciation d’une marque, dire « Je suis obligé d’en citer deux autres ». Ce qui est faux ou plutôt un zèle visant à démontrer le manque d’intérêt pour la marque.

La rencontre de la publicité et de l’information

Les points négatifs de citation d’une marque étant listés ci-dessus, quel liberté à le journaliste ? Où s’arrête la limite entre véritable information d’utilité publique et publicité clandestine ? Cette notion très subjective pose problème car même si publicité est synonyme de rémunération en argent ou en nature, le CSA n’a pas à apporter la preuve que ladite promotion s’est faite contre rémunération.

Voici donc quelques exemples de dilemmes auxquels les journalistes doivent être donc confrontés tous les jours. A vous de jouer le jeu du CSA et de vous demander s’il s’agit de publicité clandestine ou information

  • La sortie d’un nouvel iPhone / iPad
  • La citation d’une source commerciale sur un sondage
  • La diffusion d’une vidéo qui fait le buzz  faisant la promotion d’une marque (bad buzz ou good buzz)
  • L’affichage d’un logo lors d’un reportage sur une entreprise
  • La présentation d’une avancée technologique
  • La promotion d’un événement culturel

Vous pouvez imaginer que nombre de ces sujets pourraient partir à la dérive…c’est pour cela que les journalistes préfèrent faire du zèle en ignorant toute règle de sens commun à savoir :

  • citer ses sources lorsque celles-ci sont publiques (comme un site Internet par exemple)
  • identifier des marques lorsqu’il s’agit d’un caractère d’information
  • remercier l’entreprise interviewé d’avoir accueilli l’équipe de tournage et pris du temps en ne floutant pas son logo (s’il s’agit là aussi d’une interview dans un caractère d’information)

L’hypocrisie des médias face à la censure

L’absence de promotion dans le cadre d’information globale est plutôt une manne pour les médias. Ce système préservant la diffusion publicitaire classique, contrôlé et monétaire. Ainsi, on peut assister quasiment tous les soirs dans le journal de M6 (exemple parmi tant d’autres) :

  • La citation d’un sondage avec une absence de source (ou affichage en minuscule sur écran)
  • La participation d’internautes pour répondre à une question

Le « journaliste » fait donc une pierre deux coups et produit sans rien débourser une information de qualité en maîtrisant tous les maillons de la chaîne : réflexion, sondage d’opinion sur un large échantillon, info « choc » grâce à la réponse à une question d’actualité sur un faible échantillon, fourniture finale d’un « digest » qualitatif accrocheur permettant de faire de l’audimat entre deux sessions publicitaires.

Or, à mes yeux, citer une source (dans le cas d’un sondage) et en faire un lien n’a rien d’une publicité clandestine et permettrait de remercier l’investissement des marques. Une sorte d’effet gagnant / gagant : tu me donnes du contenu de qualité et je te mets en avant.

Risques de dérives et solutions

Bien sur, cela pourrait avoir un effet pervers de copinage plutôt que de recherche d’information de qualité.

A ce titre, on peut souligner quelques irrégularités et limites dans l’action de cette organisme dont voici quelques exemples :

  • Pourquoi accepte-t-on une tolérance sur les logos de sponsoring d’événements sportifs ?
  • Une émission culturelle mettant en avant un artiste peut elle être considéré comme de la publicité clandestine si cet artiste bénéficie d’une campagne publicitaire sur cette même chaine ?
  • Un groupe possédant un label de musique et une chaîne de télévision peut elle proposer des diffusions de concert sans que cela soit une publicité clandestine ?
  • Plus globalement, la censure est elle encore utile lorsque l’information non-censurée est accessible en quelques clics / tapotements sur un portable ?

On voit que certains secteurs semblent moins touchés que d’autres. Pour ce qui est de la protection de l’information, le rôle du CSA pourrait pourtant être simplifié en se posant ces quelques questions :

  • La source d’information est-elle récurrente ?
  • La source d’information est-elle la plus qualitative ?
  • La complaisance affichée sur cette marque coincide-t-elle avec une campagne publicitaire de grande envergure ?
  • Pour en revenir au SEO, on pourrait même imaginer que la citation d’un lien doit s’accompagner d’un nofollow afin d’enlever toute ambiguïté et la non-présence de cet élément pourrait être une preuve de publicité camouflée

Ainsi, pour être diffusé on arrivera à une course à l’actualité où certes les moyens important seront remerciés mais aussi l’audace et la pertinence des contenus.
Cette diffusion entrainera forcément une croissance dans l’intérêt et de nombreux curieux iront se renseigner plus en détail en recherchant l’info ou la marque sur le web. Quand on imagine les convergences tablettes/télé, ce cas est loin d’être impossible.

Pour aller plus loin dans la recherche de solution, on pourrait très bien imaginer une solution fortement protectionniste : une tolérance sur les marques et produits français. Après tout, c’est aussi un rôle du CSA de promouvoir avant tout notre patrimoine et il y a bien plus à gagner à citer Archos à la place d’Apple plutôt que de s’énerver à respecter le temps de diffusion de Maitre Gims sur les ondes françaises…

 

Arnaud Montebourg, si le warning d’alerte sur votre nom s’est déclenché sur cet article, sache que promouvoir le made in France ne peut se résumer à poser en marinière Armor Lux et robot Moulinex, vous avez une solution simple et rapide pour booster la visbilité des marques françaises. C’est cadeau.

Exemples et suite(s) de cet article

Quelques exemples qui vont dans le sens de cet article :

The Tablet-TV Connection : Etude montrant que 85% des propriétaires d’une tablette l’utilisent devant la télé. On voir d’ailleurs fleurir des tonnes d’application pour « interagir avec ce programme », ne pourrait-on pas imaginer que l’utilisateur lambda puisse aussi faire une recherche web ?

Evolution de l’intérêt des marques Cash Converters, OTI et Memphis Coffee suite à leur passage télé dans « Patron Incognito » (source Google Trends)

 

trends_patronincognito

Jaune : Memphis coffee

Rouge : OTI

Bleu : Cash Converters

 

A noter, je n’ai pas rajouté la société O2 qui était aussi dans cette émission. Toutefois la rediffusion du reportage a apporté un boost de recherche et de commandes de services chez O2 (source personnelle).

Qui possède quoi : liste des groupes propriétaires de canaux d’information (journaux, télé, radio). Une liste permettant de supposer les rapports croisés entre différentes filiales d’un même groupe.

Arret sur Images – dossier sur les Marques : le « Tabou » de la télé (payant) : de nombreux exemples sur la publicité clandestine et une ouverture sur le thème de l’agacement des annonceurs.

Liste des sanctions du CSA : pour mieux comprendre l’intérêt du CSA et se rendre compte, parfois, du dépassement de cette organisme pour le média Internet qui n’entre pas, encore, dans les mailles de ses filets et comprendre pourquoi certains médias puissent être à ce point zélés sur la censure.

La levée de bouclier sur l’autopromotion des pages sociales des médias : Coup de gueule sur une décision ringarde et stupide. Pourquoi en serait-il autrement du reste de la censure ?

Y a-t-il une censure ? Un vieille page qui a tout son sens dans le paysage audiovisuel actuel